Qu’est-ce qu'un torticolis ?
Le torticolis est une attitude vicieuse de la tête et du cou.
C'est une cause fréquente de consultation.
Certains torticolis sont remarqués dès
les premiers mois de la vie, d’autres plus tardivement.
Le torticolis musculaire congénital représente la principale
étiologie des torticolis (50 à 80 % selon les auteurs).
Les autres étiologies sont malformatives, tumorales,
oculaires ou infectieuses.
Un peu d'histoire...
Certains personnages célèbres qui ont marqué l'Histoire étaient porteurs de torticolis congénital : Alexandre, Hippocrate, François Rabelais.
La première description de traitement du torticolis par ténotomie (à ciel ouvert) a été publiée en 1749 par William Cheselden.
Le diagnostic clinique de torticolis
L’interrogatoire permet de définir la date d’apparition du torticolis, le caractère aigu ou chronique, permanent ou transitoire, parfois épisodique.
Il est souvent difficile de savoir si le torticolis est présent depuis la naissance et des photographies peuvent aider à déterminer son ancienneté.
L’interrogatoire recherche des causes déclenchantes de
torticolis épisodiques, des signes accompagnateurs éventuels,
comme des vomissements, des céphalées, des troubles de
la marche, des douleurs, un contexte fébrile.
L’inspection étudie la morphologie loco-régionale
de l’enfant (yeux, tête, implantation des cheveux, cou,
face) et recherche des anomalies associées au niveau des pieds,
des mains, du thorax, et du rachis.
La palpation recherche une tuméfaction ou une contracture musculaire,
localise d’éventuels points douloureux.
La mobilité passive et active du rachis cervical est appréciée.
Le périmètre crânien est mesuré à
la recherche de signe d’hypertension intracrânienne. L’examen
neurologique et l’examen de la sphère O.R.L. sont indispensables.
Torticolis postural congénital
Le torticolis postural est présent dès la naissance.
Ce torticolis est bénin, lié à
la position du fœtus et à la contrainte utérine :
il n’y a pas de rétraction fibreuse du muscle sterno-cleido-mastoïdien.
Il représente un tiers des torticolis de la période néo-natale,
les deux tiers étant représentés par les torticolis
congénitaux musculaires.
Il semble plus fréquent en cas de présentation par siège.
Cliniquement, l’enfant est asymétrique avec la tête et le bassin inclinés du côté de la concavité thoraco-lombaire.
Aspect de torticolis congénital postural gauche |
Il existe souvent une limitation de l’abduction de la hanche du
côté convexe par brièveté des adducteurs,
et une limitation de l’adduction de la hanche côté
concave par brièveté du tenseur du fascia lata (bassin
asymétrique congénital).
La luxation congénitale de hanche et la dysplasie de hanche (du
côté limité en abduction) sont plus fréquentes
et DOIVENT être recherchées dans un contexte d'anomalie
posturale.
Le torticolis postural régresse après la naissance lorsque
le traitement est bien conduit. Dans ce traitement l'"ostéopathie"
n'a aucune place à jouer, étant totalement inefficace
(Cf. site osteo-stop)
!
Torticolis musculaire congénital
Le torticolis musculaire congénital est une position anormale de la tête et du cou par rétraction du muscle sterno-cleido-mastoïdien.
La tête est inclinée de côté de la rétraction musculaire, mais le menton et le regard sont tournés du côté opposé. Il existe une grande variété de tableaux cliniques car l’importance de la rétraction conditionne la déformation.
Anatomie
Le muscle sterno-cléido-mastoïdien est constitué de deux chefs distincts, eux même divisés en deux faisceaux.
Schéma anatomique du muscle sterno-cléïdo-mastoïdien |
Le chef antérieur ou sternal se détache du manubrium sternal
en faisceau sterno-occipital et faisceau sterno-mastoïdien.
Le chef latéral claviculaire s’insère sur la partie
interne de la clavicule et se divise en un faisceau cléido-occipital
postérieur et un faisceau cléido-mastoïdien plus
antérieur.
Incidence
L’incidence du torticolis musculaire congénital
varie de 0,084 % et 1,9 %.
Cheng retrouve une incidence de 1,3 %.
Etiologie
De nombreuses théories
ont été proposées.
La plus anciènne attribue le raccourcissement du muscle sterno-cléido-mastoidien
à un traumatisme obstétrical (14 à 41 % de difficultés
obstétricales et de présentation par siège selon
les auteurs). La tuméfaction décrite comme une «
olive » a été longtemps prise pour un hématome
évoluant en contracture fibreuse. Mais cette théorie est
infirmée par plusieurs arguments :
l’absence
dans le tissu musculaire d’hémosidérine, marqueur
des hématomes évolués.
l’existence
de cas familiaux sans antécédent de difficulté
obstétricale.
le fait que
plus d’un tiers (37,82 %) des enfants avec torticolis congénital
ont bénéficié d’un accouchement normal. Les
problèmes obstétricaux sont en fait secondaires à
l’existence du torticolis, empêchant la version spontanée
de l’enfant.
Une autre théorie, retenue par Davids, est celle d’un véritable
syndrome des loges du muscle sterno-cléido-mastoïdien survenant
pendant la vie intra-utérine ou en période péri-natale.
Cette théorie s’appuie sur des mesures de pression intra-musculaire
et les images de remnographie (imagerie par résonance magnétique).
La flexion et rotation de la tête entraîneraient donc une
ischémie et un œdème du muscle sterno-cléido-mastoïdien
enfermé dans sa loge aponévrotique évoluant ensuite
vers la fibrose.
Diagnostic
Chez le nourrisson, ce sont souvent les parents qui remarquent la déviation de la tête et du cou.
Aspect d'inclinaison de la tête sur l'épaule gauche en rapport avec le raccourcissement musculaire
|
L’inclinaison et la rotation de la tête sont permanentes avec installation rapide d’une plagiocéphalie.
Plagiocéphalie : déformation asymétrique de la tête, secondaire à l'attitude permanente en rotation sur un crâne déformable en début de vie
|
La tête est inclinée du côté de la tuméfaction,
le menton est tourné du côté opposé.
La palpation recherche à la partie inférieure du muscle
une tuméfaction (l’olive), présente dans plus d’un
tiers des cas. Cette tuméfaction apparaît entre 2 et 4
semaines de vie et disparaît entre deux et six mois.
Olive musculaire du sterno-cléido-mastoïdien |
La rotation de la tête du côté de
la lésion est diminuée.
Une asymétrie faciale peut être retrouvée, avec
surélévation de l’épaule du côté
controlatéral.
Le reste de l’examen clinique recherche une asymétrie d’abduction
de hanche, des malpositions des pieds, une courbure thoraco-lombaire
évoquant une scoliose du nourrisson.
Chez l’enfant de moins de 4 mois, avec la notion d’une tuméfaction
et d’une rétraction secondaire, le diagnostic est assez
aisé dans cette forme typique et ne nécessite aucun examen
complémentaire.
Rétraction musculaire de l'olive, qui apparaît sous forme de fibrose |
L’échographie a peu d’intérêt.
Après l’âge de la marche, la déformation est
fixée avec une translation et rotation du côté opposé
de la rétraction.
Inclinaison de la tête après l'âge de la marche |
Il existe une asymétrie de hauteur des oreilles et des épaules,
bien visible de dos .
Evolution
La régression de la tuméfaction est
constante, mais la transformation fibreuse ou la régression complète
sont imprévisibles.
Le torticolis musculaire congénital se présente donc sous
trois formes :
Une forme
précoce, découverte par la rotation permanente de la tête,
avec palpation d’une tuméfaction
basi-cervicale. Cette tuméfaction disparaît en moins de
six mois, ou évolue vers une rétraction fibreuse organisant
le torticolis.
Une forme
plus tardive de l’enfant de 4 mois, avec déformation
tridimensionelle de la tête et du cou, et perception d’un
muscle rétracté, sans olive.
Une forme
encore plus tardive
de l’enfant de 4 ans, conséquence ou évolution des
deux formes précédentes. Ce type de torticolis n’est
jamais régressif spontanément.
La présence d’une tuméfaction augmente la sévérité
du torticolis et son déficit de mobilité.
Un déficit en rotation de plus de 15° est également de mauvais pronostic.
Associations pathologiques
Selon les séries, la maladie luxante de hanche (dysplasie, luxation) est associée au torticolis dans 2 à 29 % des cas.
Toute aspect asymétrique chez un nouveau-né
impose une grande vigilance. En effet, une asymétrie témoigne
d’un conflit postural et doit faire rechercher un problème
de hanche.
Les asymétries de crâne (plagiocéphalie) sont très
fréquentes.
Des anomalies positionnelles des pieds (metatarsus
varus, pied
calcanéo-valgus) sont présents dans 6 % des cas.
Chez les enfants vus tardivement, on observe une scoliose qui correspond
le plus souvent à une courbure compensatrice.
Scoliose du torticolis non traité |
Le caractère structural peut parfois apparaître
et la correction du torticolis ne modifie pas son angulation.
Traitement
Pendant la première année de vie, le
traitement est orthopédique, par kinésithérapie,
et donne de 61 à 99 % de bons résultats.
Ce traitement associe les postures et la kinésithérapie
traditionnelle.
En effet, les étirements semblent stimuler la myogenèse.
La kinésithérapie est poursuivie pendant 2 à 6 mois.
La durée et le rythme du traitement sont fonctions du déficit de rotation et de l’âge de la prise en charge, mais le rythme des séances est assez intensif (parfois 5 par semaine).
Scéance de kinésithérapie par étirement musculaire du sterno-cléido-mastoïdien : inclinaison de la tête |
|
Séance de kinésithérapie par étirement musculaire du sterno-cléido-mastoïdien : rotation de la tête |
On donne aussi aux parents des conseils d'ergothérapie
visant à positionner l’enfant de façon inverse à
son positionnement naturel : placer le biberon
du côté du torticolis pendant la tétée, placer
les sources lumineuses et sonores de façon à favoriser
la rotation de la tête dans le secteur déficitaire.
Le jeu de posture dans le lit, associé à la croissance
du cerveau entraînant l’expansion des os du crâne
permettent la guérison des plagiocéphalies postérieures.
L’"ostéopathie" n’a
aucune place dans cette prise en charge : d'une part, elle est sans
aucun effet, d'autre part, elle ne fait que retarder la mise en place
de la kinésithérapie et la consultation d'orthopédie
pédiatrique (risque de passer à côté des
problèmes associés comme la luxation de hanche) !
La chirurgie est nécessaire dans 3 à 5 % des cas lorsque
la rétraction est installée.
Les facteurs de risque d’une chirurgie sont l’âge de prise en charge (entre 1 et 3 mois, donc une prise en charge initiale par "ostéopathie" peut conduire à une intervention chirurgicale ultérieurement !), le déficit de rotation initial de plus de 15° et la présence d’une tuméfaction.
La chirurgie n’est jamais réalisée avant l’âge de 1 an mais plutôt entre 2 et 3 ans.
Les meilleurs résultats sont obtenus chez l’enfant de moins de 10 ans, notamment en ce qui concerne la correction de l’asymétrie faciale.
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Chirurgie d'allongement du muscle
sterno-cléido-mastoïdien : section des muscles à
différents niveaux et suture en Z |
La chirurgie reste utile chez l’enfant de plus de 12 ans, car même si la correction de l’asymétrie faciale est faible, l’enfant gagne en mobilité et en port de tête.
Une immobilisation post-opératoire est souvent associée au geste chirurgical.
Immobilisation post-opératoire pour une durée de
6 semaines environ, de façon à garder un allongement
maximal sur la suture musculaire. |
Les informations de cette page sont issues des références bibliographiques suivantes :
|
Les torticolis chroniques chez l’enfant |